La saison cyclonique 2025 aura une fois de plus mis Haiti face à ses fragilités structurelles. Si le pays a échappé au pire, les épisodes successifs d’averses torrentielles, de vents violents et d’inondations rapides ont rappelé l’urgence d’une gouvernance climatique modernisée. Entre constats techniques et exigences citoyennes, ce bilan met en lumière la nécessité d’un leadership renouvelé en matière de gestion des risques.
De juin à novembre, la saison cyclonique 2025 s’est distinguée par une fréquence accrue de perturbations atmosphériques. Même si les plus puissants systèmes ont contourné le territoire, plusieurs tempêtes tropicales ont suffi pour saturer les sols, provoquer des crues soudaines et affecter des milliers de familles déjà vulnérables.
Les équipes d’Haiti-METEO ont multiplié les surveillances, alertes et analyses, traduisant en temps réel l’évolution d’un bassin atlantique fortement influencé par le réchauffement global. Cette vigilance permanente a permis de réduire les impacts humains, mais elle ne saurait masquer l’évidence : la capacité nationale de préparation reste trop limitée.
Prévention : un effort réel, mais insuffisant face à l’intensification des menaces
Si les campagnes d’information se sont amplifiées, notamment grâce aux bulletins météorologiques réguliers, la prévention demeure freinée par l’absence d’un système d’alerte pleinement opérationnel à l’échelle communautaire.
Dans plusieurs régions, le manque d’infrastructures résistantes et la défaillance des réseaux de communication ont compliqué l’acheminement des consignes d’évacuation. Les comités locaux de protection civile, malgré leur bonne volonté, sont encore dépourvus de moyens techniques adaptés à la réalité climatique moderne.
Gouvernance : le besoin pressant d’un leadership renouvelé
Au-delà des défis techniques, l’année 2025 renvoie à un constat incontournable : la gestion des risques en Haïti réclame un leadership fort, stable et visionnaire.
Un leadership capable d’unifier les acteurs — État, collectivités, institutions techniques, communautés — autour d’une stratégie cohérente et fondée sur la science.
Cette modernisation passe par :
une coordination institutionnelle renforcée ;
l’intégration systématique des données météorologiques dans les décisions publiques ;
une dépolitisation des mécanismes de gestion des catastrophes ;
un investissement massif dans la résilience des territoires.
À défaut, chaque saison cyclonique continuera d’exposer les mêmes failles, année après année.
Résilience : une construction collective encore trop fragile
Malgré les efforts d’éducation et de sensibilisation menés par les acteurs du climat, notamment Haiti-METEO, la résilience communautaire demeure fragile.
Les zones urbaines saturées, les plaines agricoles surexploitées et l’érosion accélérée réduisent la capacité du pays à absorber les chocs climatiques.
Pour espérer inverser la tendance, les experts appellent à une approche intégrée combinant :reforestation stratégique,aménagement du territoire,renforcement des normes de construction,et financement durable de la gestion des risques.
La saison cyclonique 2025 ne se résume pas à un enchaînement de perturbations tropicales. Elle constitue un rappel sévère : sans vision, sans coordination et sans leadership affirmé, Haïti restera à la merci du premier système atmosphérique venu.
L’heure est venue d’assumer collectivement la responsabilité d’un pays plus résilient, où la science, l’anticipation et la gouvernance deviennent les véritables remparts contre les catastrophes.
Texte de l’agronome Talot Bertrand, responsable de la Promodev.
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