ÉDITORIAL. — Par Yves Manuel
Été 2025: Boom touristique au Cap-Haïtien : un autre visage d’Haïti émerge
Dans un pays trop souvent relégué aux chroniques du désespoir, Cap-Haïtien incarne aujourd’hui un contre-récit vibrant et nécessaire. Alors que la peur, l’instabilité et la violence dessinent depuis trop longtemps les contours de l’actualité haïtienne, la deuxième ville du pays, elle, s’élève, respire, attire. Elle redonne vie à l’idée qu’Haïti peut encore séduire, accueillir, inspirer.
L’été 2025 marque un tournant. Le Cap-Haïtien affiche complet, déborde même. Hôtels pris d’assaut, maisons d’hôtes saturées, véhicules de location introuvables : cette effervescence touristique témoigne d’un changement profond. Une dynamique nouvelle, palpable, née d’une volonté politique affirmée et d’un engagement concret au service du pays.
Le ministre du Tourisme, John Héric Dessources, a su relever le défi de l’image. Il a compris que l’attractivité d’un territoire ne se décrète pas : elle se construit. Par une communication habile, par des actions ciblées, par une valorisation intelligente de notre patrimoine. Il a offert au Cap-Haïtien une vitrine, il lui a offert surtout une voix, différente, audible, crédible.
Mais ce succès ne peut rester suspendu à la seule volonté d’un homme ou à la ferveur estivale. Le tourisme, pour être durable, doit reposer sur des fondations solides : sécurité, propreté, accessibilité, infrastructures. Et c’est ici que la mairie du Cap-Haïtien entre en scène. Elle doit assumer pleinement ses responsabilités. Nettoyer les rues, organiser les circuits touristiques, encadrer les plages, faire respecter les normes sanitaires et environnementales. Il ne suffit pas d’attirer les visiteurs, encore faut-il les retenir et les faire revenir.
Ce qui se joue aujourd’hui au Cap dépasse le simple engouement de vacances. C’est une bataille culturelle et économique, une reconquête de la dignité nationale par la beauté et l’hospitalité. C’est une preuve vivante que, malgré Port-au-Prince en crise, Haïti reste plurielle, diverse, capable du meilleur.
Le monde regarde Haïti avec prudence. À nous de l’amener à nous regarder avec espoir.
Le Cap-Haïtien a montré la voie. Aux autres villes de suivre l’exemple. Et à l’État haïtien, dans son ensemble, de faire enfin du tourisme un pilier stratégique du redressement national.
Car dans les rires des enfants sur les plages de Rival, dans la fierté d’un guide au pied de la Citadelle, dans les conversations animées des terrasses du centre-ville, bat peut-être déjà le cœur d’une Haïti réconciliée avec elle-même.
Yves Manuel
Journaliste engagé, défenseur des récits positifs haïtiens
