Haïti : et si la réforme de l’État commençait par le tourisme ?

Éditorial par Yves MANUEL
En Haïti, nous avons trop longtemps toléré une administration publique dévoyée, rongée par le clientélisme, les nominations partisanes et l’absence de règles claires. Les citoyens, fatigués des promesses sans lendemain, ont fini par perdre confiance dans leurs propres institutions. Mais voilà qu’un geste inédit vient briser ce cycle délétère : le ministère du Tourisme, dirigé par John Herrick Dessources, ose replacer la compétence au cœur du service public.
La journée d’examen organisée par ce ministère n’est pas un simple concours. Elle est une déclaration politique et morale. Devant des ordinateurs, dans une atmosphère sereine et transparente, des candidats ont concouru à armes égales. L’Office de Management et des Ressources Humaines (OMRH) a supervisé l’ensemble du processus, garantissant que personne ne puisse tricher avec l’avenir. Ici, seule la compétence a parlé.
À l’issue de ce concours, les lauréats seront automatiquement nommés, conformément à la loi. Voilà une révolution silencieuse dans un pays où trop souvent, l’accès à la fonction publique se gagnait dans les salons politiques plutôt que dans les salles d’examen.
Le courage d’un ministre
John Herrick Dessources a choisi une voie rare en Haïti : celle du respect strict de la loi et de la transparence. En promettant d’intégrer au moins 16 professionnels compétents, il rompt avec la logique des protégés et des « ti-yo » placés pour faire plaisir à tel ou tel groupe d’influence. Son geste dépasse son ministère. Il adresse à la société haïtienne un message clair : il est encore possible de gouverner autrement.
Cette initiative ne doit pas rester isolée. Elle doit devenir un modèle. Car si un ministère a pu briser les vieilles pratiques, pourquoi pas les autres ? L’administration haïtienne a besoin d’air frais, de rigueur, de discipline et d’intégrité. C’est le seul chemin pour sortir de la crise chronique de confiance qui ronge le pays.
L’État n’appartient pas aux clans, il appartient au peuple. Et ce peuple réclame des actes, pas des slogans. Aujourd’hui, un ministre a eu l’audace de répondre à cette exigence. Si ses pairs s’inspirent de cet exemple, Haïti pourrait enfin amorcer la réforme structurelle qu’elle attend depuis des décennies.
Le ministère du Tourisme ne se limite plus à promouvoir une destination. Il incarne désormais une destination nouvelle : celle de la méritocratie, de l’intégrité et de la modernité.
RLnews ( RL)