Haïti : la SOHACEP alerte sur l’insécurité et dénonce l’inaction de l’État

Port-au-Prince, Haïti – La Société Haïtienne de Criminologie et d’Études Pénales (SOHACEP) tire la sonnette d’alarme sur la dégradation accélérée du climat sécuritaire en Haïti. Lors d’une conférence de presse, l’organisation a pointé du doigt la division entre le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé et le Directeur général de la Police nationale d’Haïti (PNH), Normil Rameau. Selon elle, ces tensions au sommet de l’État renforcent l’emprise des groupes armés sur le territoire national.
Pétion-Ville, le 25 février 2025._
Pour la SOHACEP, l’escalade de la violence est le résultat direct du conflit entre les deux principales figures du Conseil Supérieur de la Police Nationale (CSPN). Pendant que des luttes de pouvoir se jouent pour le contrôle de certaines institutions comme la direction générale, les délégations et les mairies, la population continue de subir les exactions des gangs.
« Chaque fois que des tensions internes éclatent au sein de l’État, c’est le peuple haïtien qui en paie le prix », regrette l’organisation.
Alors que du matériel est régulièrement livré à la PNH et que des mesures sont annoncées, la situation ne fait qu’empirer. De nombreuses familles fuient leurs domiciles, et même les enfants ne sont pas épargnés par la violence des gangs. Face à cette impuissance des autorités, la SOHACEP s’interroge sur le rôle et la mission des responsables de la sécurité publique.
Un appel à la responsabilité du Premier ministre
La SOHACEP exhorte le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé à assumer pleinement ses responsabilités en tant que président du CSPN.
« La division et le conflit qui vous opposent au Directeur général de la PNH ne mènent le pays nulle part. Chaque jour qui passe, des vies sont perdues, et des territoires échappent au contrôle de l’État », avertit l’organisation.
Elle critique également l’absence d’un plan clair pour faire face à la crise sécuritaire, alors que le Premier ministre a récemment présenté son bilan des 100 premiers jours à la Primature.
« Quels axes routiers avez-vous sécurisés ? Quelles mesures ont été prises pour venir en aide aux déplacés internes ? Comment avez-vous œuvré pour améliorer la situation dans les hôpitaux ? », interroge la SOHACEP, pointant l’aggravation de la misère et l’inaction des autorités.
Criminalité et complicité de l’État
Selon la SOHACEP, la montée en puissance des groupes armés est facilitée par une forme de complaisance, voire de complicité de certains membres du gouvernement et du Conseil Présidentiel de Transition (CPT).
L’organisation appelle à une réforme en profondeur de la stratégie sécuritaire du pays et à une meilleure coordination entre les institutions concernées. Elle exhorte également la population à identifier les véritables responsables du chaos actuel.
« Les criminels ne sont pas seulement ceux qui tiennent des armes, mais aussi ceux qui, en costume-cravate, alimentent et protègent ce système », insiste la SOHACEP.
Par ailleurs, dans ce contexte de crise, l’organisation juge inopportun le projet de référendum constitutionnel prévu pour mai 2025. Elle dénonce le manque de sensibilisation et d’information autour du processus, ainsi que l’exclusion des départements de l’Ouest et de l’Artibonite, qui représentent 55 % de l’électorat.
« Comment peut-on parler de consultation populaire alors que les gangs empêchent la libre circulation et que la majorité des citoyens vivent dans la peur ? », questionne la SOHACEP.
L’organisation a officiellement demandé au Conseil Électoral Provisoire (CEP) de suspendre le processus en attendant l’instauration d’un climat sécuritaire stable. Elle appelle également le CPT à faire pression sur le CEP pour garantir des élections libres et inclusives.
RLnews