L’industrie musicale haïtienne jadis nourrie par des voix puissantes, à l’image d’un Wanito ou d’un Jean Bernard Thomas, est vidée de son essence. Ceux que j’appelle les VRAIS aux textes engagés et à la richesse rythmique unique sont aux abonnés absents. Kote moun yo? Mwen pa wè moun yo!!! À l’évidence l’industrie semble aujourd’hui prise d’assaut par une vague de chianteurs aux productions aseptisées du “yenyen, yenyen”. Des “chianteurs à l’eau de rose” comme Teddy truc, Mebel Chose et *L machin occupent désormais le devant de la scène, au détriment de la profondeur artistique, de l’engagement social et de l’identité culturelle.
La tendance actuelle favorise des chansons centrées sur des histoires d’amour barbantes et banales, souvent répétitives et sans ancrage dans la réalité haïtienne. Ces artistes, plus préoccupés par leur image Instagram que par le message qu’ils véhiculent, proposent une musique commerciale, rapide à produire mais pauvre en contenu. Ils ne sont en rien différents de la marchande de “pate kòde” dans le principe.
Cette superficialité fragilise l’utilité métaphysique et le rôle traditionnel de la musique haïtienne comme force. Le public jeune, surexposé à ces hits faciles, s’éloigne peu à peu des grands noms porteurs d’histoire et de conscience.
Il faut souligner sans partialité aucune que ces chianteurs” ne sont pas les seuls à blâmer si c’est ce genre de camelotte musicale “médiocrisante” qui parvient jusqu’au consommateur final. Les maisons de production sous l’emprise de l’âpat du gain, les médias toujours assoifés d’audience ont leur part de responsabilité. Ils se voient forcés à privilégier les hits de feu de paille. Les radios saturent les ondes de titres qui se ressemblent tous écartant les artistes aux plumes fortes et intenses, tandis qu’un public mal éduqué musicalement consomme sans recul.
Il est urgent de rééquilibrer la scène. Redonner voix aux artistes qui osent dire, dénoncer, raconter. Promouvoir une musique rien que pour le rythme, “ça frôle le gâchis”, elle doit aussi faire réfléchir.
Negr’Orangé
