Joseph Guyler Delva alerte la SIP : « Être journaliste en Haïti, c’est risquer sa vie chaque jour »

En exil à Miami, le secrétaire général de SOS Journalistes, Joseph Guyler Delva, a livré un témoignage poignant à la 81e Assemblée générale de la Société interaméricaine de presse (SIP), tenue à Punta Cana. Il dénonce la complicité d’acteurs étatiques avec les gangs armés et tire la sonnette d’alarme sur la disparition progressive de la liberté de la presse en Haïti.
Punta Cana, République dominicaine, le 18 octobre 2025.– La voix du journaliste haïtien Joseph Guyler Delva a résonné comme un avertissement à la 81e Assemblée générale de la Société interaméricaine de presse (SIP). Selon lui, la presse haïtienne vit l’une des périodes les plus sombres de son histoire.
« La situation est indescriptible. Les gangs contrôlent le pays, et certaines personnes au sein du gouvernement les soutiennent », a-t-il dénoncé sans détour.
Pour Delva, cette complicité entre pouvoir politique et groupes armés explique le climat de peur qui muselle les journalistes. Il a évoqué le meurtre d’un bébé par une bande criminelle, un acte d’une brutalité inouïe dont la presse n’a pas pu rendre compte par crainte de représailles.
« Les journalistes n’osent plus parler. Ils savent que les gangs ont des protecteurs puissants », a souligné l’ancien président de l’Association des journalistes haïtiens.
Menacé à plusieurs reprises, Delva a été contraint de quitter Haïti pour se réfugier à Miami, où il continue de plaider pour la liberté de la presse et la sécurité des journalistes haïtiens. Il affirme que le pays est désormais « abandonné aux mains des bandes » et que « rester en vie dépend souvent de leur bon vouloir ».
Une liberté de la presse en péril total
Depuis plusieurs années, Haïti figure parmi les pays les plus dangereux pour les professionnels des médias. Les assassinats, les enlèvements et les menaces sont devenus monnaie courante. En 2025, plus de 4 000 homicides ont été enregistrés au premier semestre, témoignant d’un effondrement total de l’ordre public.
La plupart des journalistes travaillant sur la corruption, les violations des droits humains ou les liens entre politique et criminalité sont obligés de se cacher, de s’exiler ou de cesser leurs activités. Le silence s’installe, alimenté par la peur.
« Quand les gangs dictent la loi et décident de qui doit vivre ou mourir, la presse devient une cible naturelle », a insisté Delva devant les délégués de la SIP.
Appel à la solidarité internationale
Face à cette réalité, Joseph Guyler Delva a exhorté les organisations internationales à protéger les journalistes haïtiens. Il plaide pour des mécanismes de protection urgents et un accompagnement diplomatique en faveur de la liberté d’expression.
« Informer ne doit pas être un crime. Nous demandons à la communauté internationale de ne pas détourner le regard », a-t-il lancé.
La SIP, qui réunit des centaines de médias du continent américain, a exprimé sa préoccupation face à la détérioration de la situation en Haïti. L’organisation envisage de renforcer son plaidoyer auprès des États membres pour la défense des journalistes haïtiens.
Yves MANUEL
RLNEWS
Source : DiarioLibre